AU plus profond de tes rêves
Dans le registre de la japanimation, il faut désormais compter avec Satoshi Kon. Transfuge du manga et petites mains sur des classiques de l’animé comme Patlabor 2, Roujin Z et Memories, Satoshi Kon gagne ses galons d’auteur dès le premier long-métrage dont il assure la réalisation, Perfect blue, thriller horrifique habilement calqué sur les gialli italiens de Mario Bava et de Dario Argento. Mais, plutôt de végéter dans un genre où un succès l’a implanté, Satoshi Kon sort radicalement de son ornière par l’intermédiaire de Millenium actress, lyrique chronique romantique qui embrasse toute l’histoire contemporaine du Japon, puis avec le truculent et intimiste Tokyo godfathers, conte de Noël iconoclaste et généreux. Deux pépites.
Egalement responsable d’une série TV animée (Paranoïa agent), Satoshi Kon ne baisse pas en inspiration et régime avec Paprika, éblouissante fable morale dans laquelle onirisme, psychanalyse, énigme et science-fiction cohabitent le plus harmonieusement du monde. Prétexte au récit : une machine expérimentale de traitement psychothérapeutique disparaît d’un laboratoire. En de mauvaises mains, elle permet non seulement de pénétrer les rêves des patients – sa fonction première -, mais également de les faire vaciller dans la folie. Et plusieurs de ses inventeurs en font les frais… Une jolie scientifique et un flic mènent l’enquête, la première se transformant en la délurée Paprika lorsqu’elle pénètre le monde virtuel des rêves, le second nettement moins à son aise dans cet univers instable qui tend à déborder sur le réel.
Les idées, comme les rêves, débordent justement de partout dans Paprika. D’abord sous forme d’une idée formidable, géniale de ressources visuelles, d’une parade bigarrée qui déferle dans un mouvement de lave en fusion… Assurément l’un des points forts d’un film astucieux, malin qui renvoie autant au Vertigo d’Hitchcock qu’aux fleurons de la japanimation. Baignant dans un climat de tension constante qu’entretient la musique de Susumu Hirasawa, imprévisible d’une scène à l’autre et autant délectable de mystère qu’une promenade autour de minuit entre les manèges et baraques d’une fête foraine désaffectée, Paprika possède le goût, les saveurs du piment doux dont il emprunte avantageusement le nom.
Paprika
Sélection officielle au Fastival de Venise 2006
Film d'animation de Satoshi Kon